
Ce que l’été de la COVID m’a appris
Flashback vers le printemps 2020. Après les feux dévastateurs en Australie, l’acquittement d’un président américain corrompu, l’éclosion d’un nouveau virus qui devint une pandémie et qui cloisonna la terre pendant plusieurs mois, et l’apparition de mouvements sociaux comme « Black Lives Matter » et « Je te crois ». L’été 2020 devait nous permettre de nous ressourcer et de prendre le recul nécessaire afin de mieux saisir ce qui s’est passé au cours des derniers mois.
Je dis « devait », car, manifestement, il est maintenant juste de proposer que nos relations avec les technologies, les communications et les êtres pensants sont malades ou, à tout le moins, déréglées. Qu’est-ce qui a bien pu nous mener jusqu’à ce point de rupture social et intellectuel? Qu’a-t-il pu se passer pour que nous soyons divisés à ce point? Pourtant, lors des derniers sondages pré-Trump, l’Amérique et l’Europe n’avaient jamais été aussi unies. Les États-Unis se rangeaient derrière le premier président afro-américain et l’Europe filait le parfait bonheur dans son Union.
En quelques années seulement, nous avons vu la montée des extrémistes politiques et économiques, de la gauche et de la droite. Nous avons assisté à une radicalisation des propos racistes, misogynes, emplis de jugement et de haine sur les réseaux sociaux et dans les médias traditionnels.
Loin de moi l’idée de vouloir faire un portrait sociologique ou anthropologique des dernières années, voire même des derniers mois. Ce qui m’intéresse, c’est plutôt l’apport de la technologie dans cette descente aux enfers. Prenons le temps de prendre du recul et de comprendre comment le savoir-faire et le savoir-être des derniers mois proviennent directement du manque de « savoir-vivre numérique ».
Comment la philosophie de BYOD est-elle venue contrer les efforts d’unification en quelques mois seulement?
Le BYOD (Bring Your Own Device, ou apportez votre appareil personnel de communication) est une philosophie de gestion développée dans les années 2000. Avec la rapidité des changements technologiques, la multitude d’outils technologiques disponibles et les préférences de chaque employé, plusieurs entreprises ont décidé de permettre à leurs employés de travailler à partir de leurs outils de communication personnels. Ainsi, le devoir de la comptabilité informatique et du versionnages des informations et de différentes versions des documents et logiciels est devenu le fardeau des TI des dites entreprises. Un casse-tête sans fin qui demande une connaissance accrue des différentes technologies disponibles et qui exige, pour les entreprises, d’offrir de l’accompagnement et de l’aide aux employés sur des outils et des applications qui ne sont pas les leurs.
Bien que facilitant l’intégration des technologies et achetant la paix, cette philosophie, encore utilisée aujourd’hui, arrive avec son lot de problèmes. Premièrement, les employés mélangent travail et loisir. Le même téléphone intelligent est utilisé pour prendre les courriels du travail et naviguer sur Facebook ou sur Reddit. Deuxièmement, l’employé est en constant contact avec le travail. 24 heures sur 24, il est possible de le joindre. Certains pays ont même dû voter des lois afin de permettre un débranchement une fois les heures de travail terminées.
Comment cette philosophie de gestion a-t-elle permis l’élection du président Trump et augmenté les propos racistes sur les réseaux sociaux?
Simple : c’est une question d’argent et l’argent pour les réseaux sociaux… c’est vous.
Sur le Web, quand c’est gratuit, c’est vous le produit. Les Facebook et Google de ce monde font une fortune en vendant votre profil de consommateur à des tierces parties afin qu’elles puissent vous solliciter. Ce sont les publicités ciblées dont on entend beaucoup parler.
OK, mais pour vrai là, comment le BYOD A changé la manière dont on consomme?
Tout simplement en raison du temps de connexion. Plus vous êtes connecté longtemps sur votre téléphone ou sur le Web, peu importe le moyen, plus vous pouvez voir, recevoir et interagir avec des publicités. Autrement dit, plus vous êtes connectés, plus vous êtes rentables pour les GAFA(M) (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft). C’est là que les algorithmes apprenants entrent en jeu.
La petite histoire des algorithmes sociaux
Sans refaire l’histoire complète des algorithmes, rappelons simplement les grandes lignes de ces incompris de l’ère numérique. Issus de l’algèbre moderne, créée par Al-Khwârrizmî et par la logique fondée sur les écrits d’Euclide, les algorithmes simples utilisent la méthodologie « Diviser pour régner ». Cette méthode, utilisée entre autres dans les tris ou dans les tris d’ensemble, permet de réduire le nombre de comparaisons pour ordonner un ensemble. Utilisés à la main ou à l’aide d’un support visuel, ces algorithmes de base demandent un temps de traitement élevé.
Nous avons souvent pu voir ce type d’algorithme illustré où on pose des questions auxquelles on répond par oui ou non qui nous permettent de trouver une action à poser. Ce sont les mêmes principes qui sont utilisés dans les jeux-questionnaires qui vous permettent de savoir dans quelle maison d’Hogwarts vous vous retrouveriez.

Le principe pour écrire des algorithmes est de minimiser le nombre d’opérations à réaliser pour que la réponse soit plus rapide. Un peu comme pour les dénominateurs communs, vus dans les cours de mathématiques. Cependant, une notion de temps raisonnable est instaurée. Cette notion demande qu’un compromis soit fait afin d’accélérer davantage la résolution de l’équation. On coupe ainsi les coins ronds pour une réponse rapide. On catégorise rapidement pour que le dénominateur commun soit appliqué le plus expressément possible. De cette façon, l’algorithme va ainsi approximer une solution.
Avec la naissance des sciences informatiques, les algorithmes ont trouvé de nouvelles applications. La rapidité à laquelle les solutions peuvent être données est grandement augmentée et la quantité d’informations traitées simultanément est phénoménale. Ceci a donc permis de créer des algorithmes plus complexes et demandant un plus grand nombre d’étapes. Des algorithmes qui permettent donc de définir votre profil de consommateur sur les réseaux sociaux par exemple. Si tu aimes ce livre, tu aimeras sûrement celui-ci! Si tu aimes cette page, tu aimeras forcément celle-ci! Si tu achètes ce super produit, pourquoi n’achètes-tu pas celui-ci?
Ces algorithmes vont aussi vous proposer du contenu à regarder, des vidéos YouTube qui pourraient vous intéresser et des blogues qui rassemblent vos sujets favoris. Finie la diversité des sources. Plus vous cherchez un thème, plus vous rencontrerez du contenu sur celui-ci. Plus vous vous intéressez à des discours sociaux ou économiques de certains groupes précis, plus vous trouverez du contenu qui prouve la véracité d’une telle position. Rarement vous allez tomber sur des opinions contraires.
Les algorithmes ont permis à Facebook, Google et Amazon (même Netflix) de créer de grandes catégories de consommateurs et d’internautes. Triées par centres d’intérêt, par achats, par lieux visités ou même par thématiques de recherche, ces grandes catégories sont maintenant vendues à des tierces parties qui peuvent faire de la publicité ciblée sur un type précis de profil. Ces parties peuvent vendre des produits, des services ou des idées (sociales ou économiques). En revanche, pour que les publicités performent, il faut que l’internaute reste connecté à la plateforme le plus longtemps possible.
Comment rester captif d’une application ?
Vous arrive-t-il de cliquer sur un lien Web dans Facebook mobile et de vous rendre compte que le site s’ouvre sur un fureteur qui n’est pas celui que vous utilisez habituellement?
Facebook, Pinterest et plusieurs autres plateformes utilisent cette technique afin de garder les internautes captifs de leur environnement, leur permettant ainsi de capter des données supplémentaires sur leurs activités Web. Naturellement, il est possible de désactiver cette option et de faire ouvrir les liens externes dans un fureteur de confiance. Toutefois, vous devrez répéter l’opération pour la désactiver à nouveau lors de la prochaine mise à jour.
Rappelez-vous! Quand l’utilisation d’un outil Web est gratuite, c’est vous le produit. Vos données de consultation et de recherche sont utilisées pour mieux cerner le type de consommateur/chercheur que vous êtes.
La récolte de données personnelles et les batailles juridiques
Au fil des ans, plusieurs pays ont mis en place des séries de mesures et de lois permettant d’encadrer le type d’information recueillie ainsi que le temps de conservation des données à des fins de revente et de publicités ciblées. L’une des lois les plus sévères est sans doute le RGPD (Règlement général sur la protection des données). Il s’agit d’une loi européenne qui concerne le traitement et la circulation des données à caractère personnel. Elle a pour objectif d’harmoniser le panorama juridique européen en matière de protection des données. Jusqu’en 2015, l’Europe avait un système juridique dit du « Safe Harbor », qui permettait aux entreprises américaines d’importer aux États-Unis les données personnelles de citoyens européens. Invalidé le 1er octobre 2015, après les révélations d’Edward Snowden sur le programme PRISM, ce système juridique a été remplacé par le RGPD.
Entré en vigueur le 25 mai 2018, le RGPD a permis de mieux définir ce qu’était une donnée personnelle, ce que les entreprises qui collectent de telles données doivent apporter comme sécurité et qui peut collecter des données personnelles.
En fait, c’est quoi une donnée personnelle?
Selon le RGPD, une donnée personnelle ou une donnée à caractère personnel est une information qui concerne une personne physique, identifiée directement ou indirectement. Il peut s’agir d’un nom, d’une photographie, d’une adresse IP, d’un numéro de téléphone, d’un identifiant de connexion, d’une adresse postale, d’une empreinte, d’un enregistrement vocal, d’un NAS, d’un courriel, etc.
Certaines données sont sensibles : elles touchent à des informations qui peuvent donner lieu à de la discrimination ou à des préjugés. Les opinions politiques, les religions, les engagements syndicaux, les appartenances ethniques, les orientations sexuelles, les situations médicales ou les idées philosophiques sont des données sensibles. En Europe et ailleurs, ces données jouissent d’un cadre particulier qui interdit toute collecte préalable sans consentement écrit, clair et explicite.
Bien que cette loi vienne alourdir le processus de navigation pour certains sites Web, elle est primordiale pour protéger les internautes des abus des GAFA(M). Le Canada a son équivalent, la LPRPDE (Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques). Bien qu’elle soit moins agressive que sa sœur européenne, la LPRPDE offre tout de même un cadre de protection pour la collecte des données personnelles sur le Web.
Mais comment la récolte de données peut-elle mener à une si grande division politique, sociétale ou économique?
Il est important de comprendre que pour le GAFA(M), les données personnelles utilisées ne sont pas votre nom ou votre NAS, mais bien vos habitudes de consommation, de recherche et de divertissement. Ainsi, il est beaucoup plus payant de savoir qu’une jeune femme entre 25 et 35 ans, qui habite dans Hochelaga entre les rues Davidson et Joliette, qui étudie à l’UQAM, qui prend le métro soir et matin pour ses déplacements, qui sort occasionnellement au restaurant du coin, mais qui se fait livrer son épicerie consomme un certain type de produits. Il est maintenant plus facile pour les GAFA(M) de vendre ce profil à une entreprise en lui disant : « C’est le type de personne que tu veux. Cette consommatrice consomme exactement ce que tu produis. Si tu veux faire apparaître une publicité sur son fil d’actualité Facebook ou sur son téléphone intelligent, voici combien ça va te coûter. »
On vient de voir un bel exemple pour un produit, mais l’exercice est le même pour les services, les idées, la politique ou les campagnes d’influence.
Donc, comment la récolte de données peut-elle mener à une division? La catégorisation de profil mène à une radicalisation en réduisant la diversité de la provenance des informations. Donc plus nous réduisons la récolte de données et le profilage, plus nous augmentons la diversité des sources d’information et gagnons ainsi plus d’autonomie dans les choix et dans les actions.
L’extrémisme et le conspirationnisme dans tout ça ?
Ne jouons pas à l’autruche : l’extrémisme et les conspirationnistes existent depuis plus longtemps que le Web. Le Web n’est pas la cause première, mais il agit comme un accélérateur d’informations. Jumelé à des algorithmes qui vous étiquettent comme conspirationniste après avoir regardé quelques vidéos seulement, le Web peut devenir un outil dangereux s’il est mal utilisé.
La beauté du Web et des réseaux sociaux, c’est que chacun a la possibilité d’avoir une voix et une tribune. Le problème du Web, c’est aussi que tous peuvent avoir une voix et une tribune! Nous avons vu au cours des dernières années la hausse flagrante de « fake news », de partage d’informations erronées, non vérifiées et portant préjudice à certaines personnes. Les « tribunes pour tous » ont aussi contribué à l’explosion de propos racistes, misogynes et disgracieux. Les études tendent à démontrer que les internautes se sentent puissants derrière leur écran et qu’ils se permettent de plus grandes envolées. Bien que des lois soient en vigueur, plusieurs d’entre elles sont appliquées au compte-goutte, faute d’effectif. Les internautes fautifs se sentent ainsi protégés et dans leur droit. Merci aux algorithmes de leur faire voir un seul côté de la médaille!
Plusieurs tests ont été effectués pour démontrer comment la radicalisation des fils de nouvelles est rapide selon les habitudes de recherche des internautes. Un test datant de 2017 réalisé par Jeff Yates, journaliste de Radio-Canada, explique bien comment les plateformes vont embarquer les utilisateurs dans une spirale infernale en poussant articles, fake news et désinformations à ceux qui veulent bien l’entendre. En 3 jours seulement, le journaliste s’est retrouvé inondé de publications axées sur la désinformation en provenance de sites Web alternatifs et non vérifiés. Ces sites sont souvent la propriété de plus grosses entreprises menant des campagnes d’influence auprès de groupes sociaux ciblés (voir l’article sur le cas de Cambridge Analytica pour mieux saisir l’ampleur de la bibitte).
Donc est-ce que nous devons nous déconnecter du Web et nous promener avec un chapeau en papier d’aluminium ?

Les réseaux sociaux et les plateformes des GAFA(M) utilisent des techniques qui peuvent s’avérer dommageables pour certaines personnes. Ces techniques sont légales, offrent une valeur ajoutée à la plateforme, permettent à plusieurs PME de contacter directement des internautes qu’elles n’auraient jamais pu joindre avant et offrent un divertissement plus qu’intéressant. Ce ne sont pas tous les utilisateurs de Facebook qui sont devenus de dangereux radicaux ou qui ont décidé de crier des bêtises et des méchancetés aux autres. Les outils Web fonctionnent bien et ils apportent une dimension de communication humaine que plusieurs rêveurs et philosophes auraient aimé avoir.
Les grands malades, ce ne sont pas les outils. Je ne parle pas ici de la gestion des entreprises ou de leurs implications dans les scandales sociaux politiques, mais bien du logiciel qu’on utilise plusieurs fois par jour pour rester connecté avec nos familles éloignées, pour se divertir et même pour s’informer. Les grands malades, c’est nous, notre manque d’éducation face à l’utilisation adéquate de ces outils et du fonctionnement de ceux-ci, qui démontre bien que nous ne savons pas ce que nous faisons.
Le manque d’éducation face aux outils est explicable vu leur nouveauté. Facebook a eu 16 ans en 2020. La plateforme a été créée en 2004, mais a été rendue disponible à tous en 2006. Il ne faut pas oublier que l’invention de l’imprimerie par Gutenberg en 1450 a mené à une innovation qui n’a permis de rendre disponible l’information écrite à un très grand nombre de personnes qu’en 1884, avec l’arrivée de la linotype. Il aura fallu 400 ans pour que les technologies arrivent à une certaine maturité et que les gens puissent utiliser les techniques adéquatement et simplement pour diffuser leur message. 16 ans pour maîtriser une nouvelle technologie qui a changé la face du monde s’avèrent comparativement bien peu.
L’éducation devrait jouer un plus grand rôle face à ces changements. Notre système actuel met l’accent sur le savoir-faire et le savoir-être, mais bien peu sur le savoir-vivre et encore moins sur le savoir-vivre numérique.
Comment le savoir-vivre numérique peut-il nous aider ?
Premièrement, qu’est-ce que le savoir-vivre numérique ? C’est une série de préceptes philosophiques et de techniques de base qui permet de normaliser, d’unifier et de simplifier les interactions sur le Web. En d’autres mots, c’est le comportement à adopter afin qu’une cohésion soit possible sur le net. On n’a qu’à penser au premier jet du savoir-vivre numérique qui était la nétiquette. Ce fameux document adopté par beaucoup d’entreprises qui jetait les grandes lignes de ce qui était acceptable ou non sur les plateformes ou leurs outils. Disponible autant pour les communications externes qu’internes, la nétiquette est venue définir les bonnes pratiques sur le Web pendant plusieurs années.
Au-delà du document, il y avait une manière de se comporter qui était dictée aux utilisateurs. Une approche qui a fait ses preuves jusqu’aux débordements causés par Twitter et Facebook. De tristes histoires célèbres démontrent le manque de jugement de certains internautes qui auraient poussé des utilisateurs de Twitter et de Facebook à se suicider. Ce sont des cas de cyberintimidation extrêmes. D’abord tolérée sur Twitter, au nom de la liberté d’expression, puis mise en lumière par de nombreuses interventions journalistiques et politiques, la cyberintimidation et toujours bien présente, mais des recours sont maintenant possibles pour la dénoncer.
Toutefois, le savoir-vivre numérique en a pris pour son rhume lorsqu’un certain Donald Trump est arrivé dans la sphère politique. Utilisant la cyberintimidation contre ses rivaux et se livrant à des envolées racistes et misogynes, le futur président des États-Unis en est venu à banaliser ces actions sur le Web. Scandant haut et fort son droit à la liberté d’expression et demandant que soit mis en lumière des scandales issus de fake news, POTUS a engendré un nouveau profil sur les réseaux sociaux.
Les groupes radicaux ont vu leurs propos propulsés à l’avant-plan. Le travail d’influence de l’équipe Trump a débuté en force. Il aura fallu près de 4 ans après l’élection d’un président bully pour que Twitter arrive enfin à apposer les mentions de mensonges, de fake news ou d’incitation à la violence sur les propos du président sur leur plateforme. Nous attendons toujours que Facebook emboite le pas, ce que la compagnie ne semble toujours pas vouloir faire au nom de la liberté d’expression.
En ne tenant pas compte des règles d’utilisation de Twitter (de leur nétiquette) afin de partager du contenu haineux et misogyne, le président des États-Unis a exposé une particularité du Web. D’une part, les créateurs et propriétaires des plateformes ne sont pas propriétaires du contenu. D’autre part, il y est difficile de démêler le vrai du faux.
Oui, mais Trump n’est pas seul
Trump n’est pas le premier à utiliser le numérique à des fins racistes et violentes. Plusieurs groupes et personnalités ont déjà fait de même, voire pire. Toutefois, l’exemple du président américain est flagrant. Des groupes de pression demandent à Twitter, Facebook et Reddit d’intervenir sur ses commentaires, mais à quel prix…
La nétiquette ne suffit plus. Il est important de s’éduquer sur le savoir-vivre numérique, sur l’empreinte numérique que nous laissons. Il est temps de faire du « savoir-publier » une formation de base pour nos jeunes et moins jeunes. Prendre conscience des actions écrites, dites, filmées et partagées est devenu une obligation.
Peu d’internautes peuvent mesurer leurs actions sur le Web. Trop peu d’entre eux peuvent expliquer clairement en quoi un commentaire haineux peut être dommageable, autant pour la personne qui le publie que pour la personne visée. Il serait temps de remédier à la situation. Des penseurs se sont déjà penché sur le sujet et offrent des pistes de solutions intéressantes.
Que pouvez-vous faire concrètement?
Jacques Cool, directeur du Cadre 21 à Montréal, l’exprime clairement depuis plusieurs années. Déjà en 2015, il faisait part du besoin du système de l’éducation de s’ajuster aux nouvelles réalités. Il conseillait déjà de passer d’une culture de l’écrit, qui est plutôt une approche analytique et linéaire, à une culture de l’image-écran, qui est une lecture globale et personnelle capable d’émouvoir. Le savoir-publier, comme monsieur Cool le nomme, consiste à s’assurer que les professeurs et les étudiants soient en mesure de débattre via un outil de vidéoconférence, de rédiger un article de blogue, de faire un live tweet, de créer une chaîne YouTube et de travailler en mode collaboratif sur la rédaction d’un texte avec des personnes à distance. Visionnaires, les défis dont Jacques Cool parle sont ceux que nous avons eu à surmonter, à l’école comme au travail, pendant la pandémie.

Plusieurs choses ont été prouvée lors de cette quarantaine obligée : l’écart de l’aisance technologique qu’il y a entre les internautes et leurs capacités à utiliser les outils qui sont présentés. Le savoir-vivre sur les plateformes numériques a été mis à rude épreuve lors de ce temps d’arrêt. Déjà, certaines écoles ont emboité le pas avec une série de cours sur la citoyenneté numérique. Le programme offre une belle entrée en matière aux étudiants sur les possibilités du numérique dans notre monde et sur les bonnes pratiques. Malheureusement, ce cours n’est pas offert partout et il aurait intérêt à être déployé à grande échelle.
La citoyenneté numérique est une avenue intéressante que vous pouvez mettre en pratique dans votre quotidien. Selon Le grand dictionnaire terminologique, un citoyen est un individu qui « bénéficie de droits et qui doit s’acquitter de certains devoirs dans une collectivité démocratique ». Droits ET devoirs, pas l’un ou l’autre, mais bien les deux. Agir en citoyen éthique et responsable sur le Web en considérant les diversités sociales, culturelles et philosophiques est un travail de tous les jours. Le gouvernement du Canada offre des guides en ligne qui permettent aux parents de mieux saisir l’importance de la citoyenneté numérique et de lancer des discussions avec leurs enfants. Il y a fort à parier que certains parents devraient aussi se renseigner sur le sujet pour leur propre bénéfice. Connaître les nouveautés et les bonnes pratiques, c’est notre devoir citoyen.
Mieux comprendre pour se protéger
Plus on est éduqué sur un sujet, plus on peut agir adéquatement. Mieux comprendre les implications de nos interactions sur le Web nous permettra de mieux agir sur les différentes plateformes.
Inutile d’être un expert sur le sujet, mais ’avoir une base permettant de participer intelligemment à la discussion et d’alimenter les échanges de façon humaine et respectueuse est crucial.
En conclusion, utilisez le Web, restez curieux et n’hésitez pas à poser des questions. Nous sommes tous dans le même bateau, qui vogue à une vitesse folle. La technologie est là pour rester, aussi bien se l’approprier et maitriser ses codes. Restons ouvert sur les nouveautés, développons notre savoir-vivre numérique et attaquons-nous au « savoir-publier ». Votre empreinte numérique a beaucoup plus d’importance que vous pouvez l’imaginer, prenons le temps de faire le tout adéquatement.
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